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Glucides post-entraînement : buvez-vous des tonnes de sucre pour rien ?

Jul 16, 2021

Il y a deux sortes de personnes dans l’industrie du fitness : celles qui vous conseillent et vous motivent pour que vous achetiez leurs produits, et celles qui vous conseillent, parce que vous les avez payées pour cela.

Bon en vérité c’est peut-être juste le cynique en moi qui parle ! Le cynisme peut tout de même être une bonne chose cela dit : il vous permet de rester objectif. Et c’est exactement ce que nous allons faire dans cet article. Nous allons examiner de façon impartiale les effets de la consommation de glucides avant et après vos séances d’entraînement.

Devriez-vous consommer des glucides après l’entraînement ?

Supposons que vous ayez consommé après votre séance d’entraînement un shake contenant des glucides sans aucune protéines. Ce genre de collation a fait l’objet de nombreuses recherches, et de faibles doses (par exemple 6g) de glucides n’augmentent pas l’équilibre protéique net après l’entraînement. Bien sûr, 6g, c’est presque rien. Peut-être qu’il en faudrait juste un peu plus pour constater un effet ? Bürsheim et al. (2004) ont donc testé cette hypothèse. Dans leur étude, les sujets ont reçu soit un placebo, soit un shake post-entraînement contenant 100 g de maltodextrine. Le résultat : la synthèse des protéines ne s’est pas améliorée, mais la dégradation des protéines a diminué, entraînant ainsi une augmentation significative de l’équilibre protéique. Cependant, l’effet était « mineur et retardé » et le bilan protéique était toujours négatif. Dans la même dynamique, Glynn et al. (2010) ont démontré que 70 g de glucides n’influençaient pas l’équilibre protéique davantage que 30, donc si vous vous apprêtez à consommer des glucides, 30 grammes devraient probablement constituer votre limite supérieure. Glynn et al. ont également conclu, dans leur revue de la littérature, qu’un équilibre protéique élevé après avoir consommé un shake post entraînement est presque toujours dû à une synthèse protéique accrue causée par l’ingestion de protéines « avec des changements mineurs dans la dégradation des protéines musculaires, quelle que soit la dose de glucides ou le niveau d’insuline circulante. » (Notez qu’ils ne se sont pas penchés sur le cas de la caséine.)

Mais après tout, si les glucides aident à réduire ne serait-ce qu’un tout petit peu la dégradation des protéines, ça peut tout de même être mieux que rien… n’est-ce pas ?

Une autre revue de la littérature sur la nutrition d’entraînement a conclu que les études où seules des protéines étaient administrées ont constaté une augmentation de l’équilibre protéique « à un degré similaire à celui des études menées précédemment qui utilisaient une combinaison d’acides aminés essentiels et de glucides ». De plus, « une petite dose d’acides aminés après une séance de musculation s’est avérée stimuler des changements similaires dans la synthèse des protéines et l’équilibre des protéines […] avec ou sans glucides ». (C’est moi qui souligne ici : Kerksick et Leutholtz, 2005). En conclusion, les glucides peuvent réduire un peu la dégradation des protéines lorsque vous ne consommez que ces derniers, mais si vous consommez déjà des protéines, les glucides ont peu ou pas d’effet supplémentaire.

Maintenant, il existe deux études (Miller et al. 2003 ; Bird et al. 2006) qui montrent que l’ajout de 35 g de glucides à 6 g de protéines augmente l’équilibre protéique net, suggérant que les glucides pourraient avoir un effet supplémentaire. Il est difficile de comprendre pourquoi ce protocole stupide a été reproduit plusieurs fois dans les recherches, mais acceptons ici de contempler l’idée l’espace d’un instant. Ces études ont utilisé la même conception expérimentale que l’étude de Rasmussen et al. (2000), et les résultats se contredisent. Selon cette dernière étude, « la dégradation des protéines musculaires n’a pas changé ». Les protéines ont stimulé la synthèse des protéines, mais les glucides n’ont en aucun cas amplifié l’effet des protéines. De plus, les sujets de l’étude de Miller et al. étaient absolument brutalisés et mal nourris. Après un jeûne, ils devaient réaliser 10 séries de 8 répétitions à 80% de leur 1RM à la presse à cuisses, puis 8×8 à 80% de leur 1RM au leg extension. Pour vous faire une idée de la violence du protocole, c’est comme faire une séance de German Volume Training avec une intensité plus élevée et en allant à l’échec musculaire à chaque série. Ensuite, histoire de « récupérer », ils ont reçu 6 g de protéines et 35 g de glucides. S’il y a une situation dans laquelle les glucides, ou tout ce qui vous donne une certaine forme d’énergie, peut éventuellement vous aider à récupérer, c’est bien celle-ci. Et même dans un cas pareil, seulement 1 des 2 études a constaté un effet supplémentaire positif des glucides.

Koopman et al. (2007) ont utilisé une conception d’étude bien plus pertinente. Ils ont examiné les différences d’équilibre protéique dans des groupes consommant 0, 0,15 ou 0,6 g de glucides par kg de poids de corps lorsqu’ils étaient ingérés avec environ 25 g de protéines après un entraînement en résistance. Leurs résultats ? « Les taux de dégradation, de synthèse et d’oxydation des protéines du corps entier, ainsi que l’équilibre des protéines du corps entier, n’ont présenté aucune différence entre les expériences. […] En conclusion, la co-ingestion de glucides pendant la récupération ne stimule pas davantage la synthèse des protéines musculaires après l’exercice lorsqu’une quantité suffisante de protéines est ingérée.

Staples et al. (2011) ont voulu reproduire la conclusion ci-dessus pour mettre un terme à la discussion une fois pour toutes. Après une séance de musculation, ils ont donné à leurs sujets soit 25 g de whey, soit 25 g de whey en combinaison avec 50 g de maltodextrine. Ils ont découvert que la consommation de 50 g de maltodextrine avec 25 g de whey ne stimulait pas la synthèse des protéines musculaires et n’inhibait pas la dégradation des protéines davantage que 25 g de whey seuls.

L’aspect le plus important des deux études ci-dessus par rapport aux études précédentes était la présence d’une dose au moins semi-respectable de protéines. Donc pour conclure, les glucides n’inhibent potentiellement la dégradation des protéines que dans des circonstances extrêmes où une quantité insuffisante de protéines est ingérée. À moins donc d’anéantir un muscle avec 18 séries poussées jusqu’à l’échec après un long jeûne et de ne pas consommer plus de 6 g de protéines, les glucides n’ajoutent rien à l’effet des protéines.

Maintenant, vous pourriez être réticent à croire tout cela. Bien sûr, il n’est pas amusant de découvrir que vous avez ajouté volontairement des tonnes de sucre à vos shakes post entraînement sans raison valable. La théorie classique des bodybuilders (lire : broscience) consiste à penser que les glucides déclenchent un pic d’insuline, ce qui aide ensuite à transporter toutes les protéines à l’intérieur de vos muscles. Traduit en termes statistiques, cela signifierait qu’il existe un effet d’interaction positif entre les protéines et les glucides sur la synthèse nette des protéines. Cette hypothèse n’est étayée par aucune recherche, et se trouve être explicitement démentie par les recherches de Miller et al. et de Staples et al. Comme pour de nombreuses théories dans l’industrie du fitness, les choses peuvent souvent sembler plausibles, mais les preuves empiriques suffisent à démontrer que c’est faux. De telles théories simplistes ne tiennent pas compte des nombreuses complexités du corps humain. Votre corps n’a pas besoin de glucides pour traiter les protéines. En réalité, votre corps n’a pas vraiment besoin de glucides pour quoi que ce soit.

Bien sûr, il existe certains scénarios dans lesquels les glucides peuvent être utiles, tels qu’une recharge en glucides (par exemple dans le cadre de la pré-compétition/manipulation de l’eau). Pendant une prise de masse classique cela dit, les glucides n’ajoutent rien à l’effet des protéines. De plus, le meilleur régime alimentaire est toujours celui qui maximise la quantité de nutriments bénéfiques que vous absorbez, compte tenu de vos contraintes caloriques. Puisque le dextrose, la maltodextrine et d’autres daubes comme la Waxy Maize Starch sont pratiquement dépourvues de nutriments et de surcroit très caloriques, ils n’ont pas leur place dans une alimentation optimale pour la santé. Au lieu de cela, vos glucides devraient provenir des légumes, des fruits et d’aliments comme le quinoa, les pommes de terre (ou patates douces) et les flocons d’avoine.

Mais alors, qu’en est-il de la resynthèse du glycogène ?

Même si les glucides classiques utilisés dans les cercles du bodybuilding n’augmentent pas l’équilibre protéique ou ne fournissent pas de nutriments de qualité, ils pourraient tout de même être nécessaires pour préserver ou reconstituer les stocks de glycogène, n’est-ce pas ?

Primo, vous devez réaliser une quantité littéralement absurde de volume de travail pour épuiser véritablement vos stocks de glycogène au cours d’une séance de musculation. Un entraînement en full body composé de 3 séries de 9 exercices chacun à 80% du 1RM n’épuise qu’environ un tiers des stocks de glycogène du corps et 9 séries sur un groupe musculaire spécifique entraînent seulement un épuisement de 36% dans ce groupe musculaire (Roy et al. 2000). Après avoir effectué des séries de 6 au leg extension à 70% du 1RM jusqu’à ce qu’un échec absolu se produise (un des protocoles les plus étrange que je connaisse) et n’avoir rien consommé par la suite, 75% des stocks de glycogène des sujets de cette étude ont été restaurés après 6h (Pascoe et al. 1993). De plus, le corps s’autorégule de manière adéquate. Plus vous épuisez le glycogène, plus la resynthèse du glycogène est rapide. Plus l’intensité de l’effort est élevée, plus la resynthèse est rapide. Plus l’épuisement est important, plus le corps stocke de glycogène pour la fois suivante. Même chez les athlètes d’endurance, la resynthèse du glycogène est souvent complète au bout de 24h. Il vous faudrait entraîner un muscle deux fois par jour avec un volume dont vous ne pouvez pas récupérer afin d’avoir besoin de glucides pour reconstituer vos stocks de glycogène à temps pour la séance d’entraînement suivante. Et si jamais vous veniez à épuiser complètement vos réserves de glycogène, vous le sauriez, car les athlètes d’endurance disent que c’est comme être subitement absolument incapable de bouger. Avoir besoin de glucides pour avoir de « l’énergie » est donc une croyance qui n’a de réalité que dans votre tête.

Origine du mythe des glucides post-entraînement

Comment se fait-il donc que le mythe selon lequel vous avez besoin de glucides dans vos shakes post-entraînement soit si répandu ? Il y a plusieurs raisons à cela :

  • Les fabricants de compléments alimentaires veulent vous faire croire que vous avez besoin de glucides, car les glucides sont extrêmement bon marché à produire. Par exemple, pratiquement tous les « gainers» sont en fait constitués majoritairement de sucre vendu à un prix ridicule.
  • De nombreuses personnes ne lisent que les recherches qui n’examinent que les glucides, sans se rendre compte que les protéines rendent les glucides totalement superflus pour la synthèse protéique.
  • La littérature préconisant les glucides pour les athlètes d’endurance peut facilement être mal interprétée par des personnes qui ne lisent que les résumés.
  • De nombreux mythes se perpétuent sans raison logique, chacun faisant passer le mot simplement parce que tout le monde le fait également passer. *insérer un bêlement de mouton ici*
  • De nombreux bodybuilders professionnels s’injectent de l’insuline après l’entraînement. Cela nécessite la consommation d’une grande quantité de glucides pour éviter de tomber en hypoglycémie véritable. Mais sans insuline exogène et sans stéroïdes, un surplus de glucides inutile est plus susceptible de se transformer en graisse qu’en muscle.

Verdict sur les glucides post-entraînement

Vous n’avez donc pas besoin de consommer de glucides après vos séances d’entraînement. Lorsqu’une quantité suffisante de protéines est ingérée, les glucides n’ont aucun effet supplémentaire sur l’équilibre protéique. Vous n’êtes pas obligé d’éviter à tout prix les glucides, mais ajouter du sucre à vos shakes post-entraînement est comme ajouter du sucre à n’importe lequel de vos autres repas. Pas forcément la meilleure des idées qui soit pour optimiser votre nutrition.

Rajouter ça à votre shaker post-entraînement ne fera pas doubler vos biceps.